Gestion de crises : quels types de crises et comment les gérer au mieux ?
« Le rôle crucial du directeur juridique dans la gestion des crises avec Jean-David Sichel, Directeur juridique et conformité chez TBWA et Georges FENECH, ancien Député et Magistrat, consultant CNews et ANews Sécurité.
Dans une période marquée par différentes crises et transitions écologiques, technologiques et législatives, les compétences du directeur juridique sont mises en avant pour anticiper, influencer et gérer le risque. À travers une typologie de crises – anticipées voire « anticipable », gérées ou imprévues – nos deux experts mettent en lumière l’importance de la préparation et le pilotage du « Business Continuity Plan » mais également la nécessité d’anticiper des crises imprévues.
Dans cet échange stimulant, ils nous éclairent donc sur la notion de crise et de son anticipation. La définition même de ce concept, tirée du grec « krisis », est rappelée comme étant une période exigeant des décisions cruciales face à un danger imminent. Cependant, la clé réside dans l’anticipation, pointe Georges Fenech, insistant ainsi sur la nécessité de prévoir et de piloter les crises plutôt que de simplement les gérer. La maîtrise du risk management est l’un des critères de fiabilité de l’entreprise et donc des investisseurs.
Si la diversité des crises est alors soulignée par Jean David Sichel, allant de la sécurité à l’environnement en passant par l’économie et l’identité, l’ancien juge d’instruction apporte de son côté un éclairage unique sur les crises anticipées telles que les ruptures organisationnelles – décès soudain d’un chef d’entreprise, défaillance de dirigeant ou mis en examen.
Aussi, le défi crucial de concilier présomption d’innocence et sauvegarde de la réputation des entreprises est ainsi abordé. Les alternatives judiciaires, telles que le statut de témoin assisté, sont également explorées comme des moyens de préserver l’intégrité des entreprises tout en garantissant une défense équitable.
Crises médiatiques ou enquêtes administratives.
Si Jean-David Sichel souligne la connaissance pour les juristes de prévoir ces crises anticipables et « processables », telles que les rappels de produits, les crises sanitaires et les attaques cybernétiques à travers des plans de continuité d’activité et des procédures internes, il s’interroge sur la manière de piloter des crises impliquant des mises en examen ou des enquêtes parlementaires et administratives, plus difficiles à gérer juridiquement.
Georges Fenech, ayant présidé des commissions d’enquête parlementaire, insiste sur le rôle crucial du directeur juridique et de l’avocat pour préparer la défense de l’entreprise et fournir une réponse transparente aux médias, ainsi qu’une information efficace et parallèle à l’égard des collaborateurs. La maîtrise du risk management pour les entreprises, notamment dans le contexte des enquêtes parlementaires, nécessitent une préparation minutieuse et ne peuvent être improvisées. Les entreprises doivent avoir un plan de gestion de crise en place, incluant aussi des mesures telles que des envois groupés de SMS pour informer les employés et la désignation d’un porte-parole.
Il rappelle ainsi les exemples d’échecs de communication passés, comme l’affaire du Mediator, Lactalis récemment ou plus loin, l’affaire Perrier en 1990, soulignant l’impact dévastateur d’une mauvaise gestion de crise. Une approche franche et réfléchie préserve la réputation et l’activité de l’entreprise.
Le directeur juridique de l’entreprise bien évidemment doit avoir un rôle essentiel avec l’avocat pour fournir au juge tous les éléments de réponse, pour préparer un système de défense, fournir les arguments, les pièces nécessaires à la manifestation de la vérité. Et il y a aussi l’aspect très important de la gestion de la parole publique.
Enfin, nos intervenants mettent en avant les crises plus globales, qui ne sont pas immédiates ni aisément gérables et qui impactent les entreprises. Ils évoquent des exemples tels que la crise des subprimes, la crise de la dette, et attirent l’attention sur les crises géopolitiques ou encore les défis posés par l’intelligence artificielle (8 millions de pertes d’emplois estimés au Royaume-Uni) pour souligner l’urgence pour les entreprises de comprendre et de s’adapter à ces évolutions technologiques et économiques majeures.
Ces transitions, disent-ils, ne sont pas seulement des sources de perturbation, mais aussi de nouvelles opportunités, avec la création de nouveaux emplois et de nouveaux modèles économiques. Cependant, cela implique également des changements profonds dans la manière dont les entreprises s’adaptent, opèrent et se conforment aux réglementations.