DRH - DÉVELOPPEMENT RH

DRH : les enjeux pour 2025

Les Ressources Humaines, piliers de l’adaptation des entreprises aux mutations constantes, continueront d’être au cœur des enjeux en 2025. Parmi les défis récurrents de la profession, on retrouve notamment la mise en conformité avec la directive européenne sur la transparence salariale dès 2026, l’identification des compétences clés de demain, et toujours les soft skills, la rétention des talents, la nécessité de repenser les parcours professionnels et les formations, ainsi que la question cruciale des seniors et de l’usure professionnelle. 

L’Agora des DRH, grâce au soutien d’experts tels que Raphaëlle Bègue, directrice associée d’Aravati, et Stéphane Maas, directeur Transitions Pro Île-de-France, nous éclairent sur les prochains enjeux RH.

Interview

Julie Guénard : Pourriez-vous chacun présenter vos entités ?

Stéphane Maas : Tout d’abord merci de votre invitation sur le plateau de l’Agora des DRH parce que nous en sommes partenaires. Transitions Pro Ile-de-France est une entité paritaire, régionale et interprofessionnelle, qui rassemble des organisations syndicales salariales et patronales. Et elle a vocation à accompagner les reconversions et plus particulièrement en matière de financement, donc des salariés qui souhaitent se reconvertir et passer par la case formation. Donc un sujet d’actualité, notamment en lien avec les grandes mutations que nous rencontrons. Et c’est à ce titre-là que je suis présent sur le plateau.

Raphaëlle Bègue : Aravati est également partenaire de l’Agora des DRH. Nous sommes un cabinet RH spécialisé sur la transformation : transformation business, transformation digitale, RSE et RH. Et nous avons quatre activités ; Executive Search, Management de transition, Délégation RH et Formation et Coaching.

Qu’est-ce qu’implique la directive européenne sur la transparence des salaires ? 

Raphaëlle Bègue : La directive européenne, votée il y a un an et effective dès 2026, a pour vocation de limiter les écarts salariaux et donc de limiter la discrimination.C’est une directive qui impose aux entreprises de plus de 250 salariés d’afficher les écarts salariaux des collaborateurs. 

Et quels sont les objectifs ?

Raphaëlle Bègue : Le premier objectif, évidemment, c’est de réduire les écarts salariaux entre les hommes et les femmes qui sont, d’après l’Insee, encore de 13 % aujourd’hui. Et plus globalement, ça va dans le sens de la non-discrimination et de l’équité.

Et quels sont les enjeux pour les DRH ? 

Raphaëlle Bègue : L’enjeu pour les DRH va être d’afficher les politiques salariales des entreprises et surtout de justifier les écarts salariaux. Il y a donc plusieurs implications. Il va falloir faire des audits internes, cartographier les salaires, benchmarker les salaires du marché. 

Le deuxième enjeu va être de définir un salaire juste, c’est-à-dire pouvoir justifier pourquoi on a des écarts salariaux sur tel ou tel métier, telle ou telle famille de métiers.

Il va falloir par exemple, pouvoir justifier des fixes, des variables en expliquant quelles sont les conditions de travail et tenir compte de la pénibilité, tenir compte des missions. Donc les DRH doivent réfléchir à la politique salariale de l’entreprise de façon rationnelle, de sorte à pouvoir à la fois attirer des talents, mais aussi faire de la rétention de talents puisque les salariés de l’entreprise auront accès à ces informations.

L’identification des compétences de demain est également un vrai défi pour les DRH.

Stéphane Maas : Toutes les mutations économiques, écologiques, numériques notamment en matière d’intelligence artificielle bouleversent notre environnement et les compétences. Parallèlement à cela, vous avez aussi des salariés qui souhaitent une mobilité professionnelle ou qui sont contraints par la mobilité professionnelle.

Et à ce titre-là, il va bien falloir définir des compétences pour permettre de s’ajuster, de s’adapter à cet environnement. Selon l’OCDE, la durée de vie moyenne d’une compétence technique (ou savoir-faire) est de 2 ans aujourd’hui, contre 30 ans en 1987. Donc cela pose une vraie question pour adapter les salariés aux compétences de demain.

Et dans ces compétences, on retrouve trois composantes essentielles. Ces fameuses compétences techniques, ces compétences soft skills, le savoir-être et les savoirs. Eh bien, le savoir-être, dans ce contexte-là est essentiel d’autant qu’il est composé de deux éléments : les compétences dites de base ; savoir compter, écrire, lire ; avoir des compétences informatiques, les maîtriser, les comprendre, les appliquer ; mais aussi avoir cette compétence d’esprit critique dites transversale afin que le salarié puisse s’adapter à son nouvel environnement.

Raphaëlle Bègue : Les soft skills vont en effet jouer un rôle primordial parce que ce sont avant tout des compétences humaines. Et ce sont ces compétences qui vont permettre à l’humain d’absorber l’avancée technologique, l’avancée en matière de RSE. Et ce sont des compétences que les machines n’ont pas.

Et si on prend le cas de l’IA par exemple, elle ne sait pas contextualiser. L’IA est une technologie qui est entraînée par l’homme, qui a des réponses très efficaces, très précises, très rapides. Mais elle n’a pas d’éthique qui est une soft skill. Donc il va falloir encourager les gens à développer des compétences afin qu’ils travaillent mieux avec la machine.

Ce sont des compétences émotionnelles, des compétences relationnelles, mais aussi des compétences cognitives, ce qui est un peu nouveau. C’est-à-dire qu’il va falloir que l’humain ait une pensée vraiment critique qui puisse analyser les réponses de la machine, les challenger.

Mais ça va aussi jusqu’à l’auto-évaluation. Toutes ces compétences qui font que l’humain va pouvoir être juste face à la machine et la maîtriser. 

Et quel rôle doit jouer le DRH sur le plan de ces compétences évoquées ?

Stéphane Maas : Il est essentiel. Le premier rôle va être l’identification de ces fameuses compétences nécessaires. C’est le premier point et c’est de les cartographier. Alors il y a nombre d’outils aujourd’hui qui existent. Vous avez le ROM 4.0 de France Travail ; vous avez la méthodologie de France Compétences. Vous avez des études aussi qui sont menées en lien avec des observatoires des trajectoires professionnelles.

Deuxièmement, ça va être de les valoriser et aujourd’hui, ça tombe bien, il y a un certain nombre d’outils comme la validation des acquis de l’expérience. Il y a de nombreuses compétences aujourd’hui qui ne sont pas valorisées et reconnues par un diplôme. Je pense qu’il faut donc absolument aller vers ce processus de reconnaissance par le diplôme et la validation des acquis d’expérience en est un exemple.

Mais aussi, on parlait des compétences dites de base qui sont essentielles ; écrire, compter, raisonner. Et ce sont des publics les plus fragilisés qui risquent d’aller vers une rupture si jamais on ne les accompagne pas. Et pour cela, il y a aujourd’hui une certification interprofessionnelle qui s’appelle CléA

Enfin, troisième étape, c’est aussi de les développer, de les adapter. Et là, vous avez un triptyque qui va être : le plan de développement des compétences ; l’entretien professionnel que l’on oublie souvent, et qu’il faut à mon avis essayer de réintégrer ; et bien évidemment, le financement. Vous avez de nombreux dispositifs de financement que nous portons pour accompagner cette construction des compétences de demain.

Et cela passe par des formations ! 

Raphaëlle Bègue : Ce que l’on voit, c’est que la formation doit être continue parce qu’il s’agit de maintenir l’employabilité du collaborateur, quel que soit son niveau.

Donc la formation devient un outil stratégique et doit être portée par les DRH, mais aussi par les Comex, les CODIR. Et surtout, elle doit impliquer les collaborateurs. C’est-à-dire qu’il va y avoir de nouvelles formes de formation qui seront complètement intégrées dans le temps de travail.

On se formera tout au long de son parcours. Les parcours deviendront de plus en plus individualisés plutôt que d’être sur des parcours un peu liés à des jobs. On va être sur des développements de compétences propres à chacun. Et d’ailleurs l’IA va beaucoup aider dans ce sens-là. La formation va donc développer les soft skills, mais aussi toutes les compétences métier en rapport à la technologie.

Et surtout avoir un ownership, c’est-à-dire qu’il faut que les DRH puissent valoriser la formation dans l’entreprise, la récompenser, la mettre au niveau des KPI’s de l’entreprise au même titre que les KPI’s business. Donc ce sont des enjeux de durabilité de la formation afin que les gens puissent être au niveau tout le temps.

Stéphane, pourquoi selon vous, la question des seniors en entreprise et celle de l’usure professionnelle sont-elles fondamentales ?

Stéphane Maas : Elle est fondamentale parce que l’allongement de la vie en 2050 pour les femmes est de 91 ans, et pour les hommes de 84,5 ans. 

Deuxièmement, il y a l’allongement de l’âge de la retraite. Puis, dernier point, c’est qu’en vieillissant, il y a l’usure professionnelle potentielle. Donc, si on ne fait pas attention au capital santé, alors on va sortir une population prématurément. C’est un vrai problème pour les entreprises et pour la société.

Rappelez-nous quelles sont les obligations légales en la matière ?

Stéphane Maas : La première obligation, c’est celle de préserver la santé des salariés. Et là, vous avez très clairement le droit qui encadre tout cela. Pénalement, l’entreprise est responsable, civilement, du résultat. Et si on va un peu plus loin, la prévention des risques professionnels doit figurer dans les DUERP (Document unique d’évaluation des risques professionnels) qui va permettre d’identifier ces risques, leur fréquence, leur nature, leur intensité avec un plan d’action obligatoire, un accompagnement spécifique. Puis, avec les partenaires sociaux, il doit y avoir une consultation, un échange sur le sujet. Cela fait partie des obligations légales.

Les DRH peuvent-ils bénéficier d’aides financières pour avoir une politique plus volontariste sur le sujet ?

Bien évidemment. Aujourd’hui, la loi sur les retraites a amené à une ouverture de nouveaux droits pour accompagner ces mouvements. La première chose, c’est la prévention de l’usure professionnelle. Il y a un fond de prévention d’usure professionnelle de 200 millions d’euros, dont 40 millions d’euros pour la partie liée à la formation en lien avec la reconversion, afin d’éviter que ces salariés se retrouvent dans une situation où mécaniquement, si vous me permettez l’expression, ils ne peuvent plus exercer leur profession.

Donc ça, c’est le premier point en lien avec tous les risques professionnels. 

Et parallèlement, vous avez le C2P, (Compte professionnel de prévention) pour tous les salariés. Eh bien, depuis la loi en lien avec les retraites, ils ont la possibilité de mobiliser ce C2P pour suivre une formation en lien avec une logique de reconversion et avec des financements complémentaires que Transitions Pro porte sur le plan national. Vous avez là quelques mesures intéressantes d’accompagnement.

Interview réalisée par Julie Guénard, General Manager de l’Agora des DRH.

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L'Agora des Directeurs des Ressources Humaines est l'une des 17 communautés d'Agora Managers Clubs, le premier réseau français permettant aux décideurs exerçant la même fonction au sein d'une entreprise de plus de 500 salariés, de créer un lieu permanent d'échanges et de partages d'expériences pour mutualiser leurs compétences et trouver ensemble, les meilleures solutions.
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