La Face Cachée des énergies renouvelables
Haro sur l’éolien, gloire au nucléaire. Fabien BOUGLÉ, auteur de « Eoliennes : la face noire de la transition écologique » et « Nucléaire : les vérités cachées (Ed du Rocher) est devenu, dit-il, en dix ans, expert en politique énergétique.
C’est en restaurant sa maison en Normandie avec des éoliennes à proximité qu’il s’est intéressé à l’éolien et à en dénoncer pêle-mêle, sa pollution et ses émissions de CO2, ses atteintes à la santé et à la biodiversité, des détournement de fonds publics, l’augmentation du prix de l’électricité ainsi que des conflits d’intérêt d’élus de la République sans oublier d’incriminer mafia et lobby écologiste.
Un point de vue à charge alors que le Projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables vient d’être voté par le Sénat. En attendant 2023, quand l’avenir du mix énergétique à l’horizon 2050 sera débattu au Parlement.
Brice Girod : Comment un juriste de formation, spécialiste de la gestion du patrimoine artistique devient lanceur d’alerte ?
Fabien Boublé : C’est en restaurant une maison en Normandie que j’ai été confronté à une centrale de 13 éoliennes à 800 mètres de cette maison. J’ai découvert dans ce cadre-là que l’essentiel des centrales éoliennes étaient installées sur les terres d’élus.
Comme j’avais été officier de réserve de gendarmerie, capitaine dans la lutte dans mon domaine, j’ai été en lien avec L’Institut de criminologie de Paris II qui m’a emmené à être en liaison avec le SCPC (Service central de prévention de la corruption) du ministère de la Justice avec lequel j’ai collaboré pendant plusieurs années. Et cela a fini par un rapport.
Ce rapport du SCPC de 2014 a dévoilé qu’il y avait grande ampleur de la corruption dans l’éolien – {{{ Rapporté à l’éolien, c’est le fait pour un élu de participer au vote d’un projet concernant cette énergie ou à une délibération en lien avec ce projet, alors qu’il en retire un intérêt ou qu’un membre de sa famille est financièrement intéressé – prise illégale d’intérêts. }}}.
Les promoteurs éoliens ont même envoyé un courrier à l’Assemblée nationale pour demander la réforme du délit de prise illégale d’intérêts, courrier que j’ai neutralisé par une dépêche AFP. Puis, j’ai dévoilé le scandale du tarif de rachat des éoliennes en mer avec une subvention de 40 milliards d’euros à l’époque. Et j’ai réussi à contraindre le gouvernement à déposer un amendement de renégociation de ces tarifs. J’ai fait économiser à peu près 10 milliards d’euros à l’époque.
Ces expériences-là m’ont amené à écrire « Eolienne, la face noire de la transition écologique » d’une part et, pendant le Covid, j’ai constaté que l’on ne pouvait pas parler du mix énergétique français sans parler de nucléaire.
Et selon la même méthode rigoureuse, c’est-à-dire un livre clair, facile à lire, mais avec près de 500 à 600 sources, j’ai publié « Nucléaire, les vérités cachées » parce que je pense qu’il y a beaucoup de vérité à dévoiler sur le sujet.
Le Sénat a adopté le 4 novembre dernier en première lecture, le projet de loi énergie renouvelable qui tend à faciliter l’installation d’énergies renouvelables en France pour rattraper le retard pris par la France. Parce qu’en 2020, la France serait le seul pays à ne pas avoir atteint le chiffre fixé par l’Union européenne, soit 23% de part de renouvelables.
Et la ministre de la Transition énergétique dit que nous risquons une amende de 500 millions d’euros. Qu’en est-il ?
La France n’est pas en retard pour les renouvelables. Elle est championne d’Europe de l’électricité décarbonée. Cela veut dire que, grâce à notre parc électronucléaire, nous n’émettons que 4 g de CO2 par kWh produit. Le gaz, c’est 500 g, le charbon 1000 g, les éoliennes dans les 50 g.
L’Allemagne, qui a 45 % d’électricité avec du charbon, émet 1000 g de CO2 par kWh produit. On aura l’occasion de voir ici des slides des mix électriques de chacun des pays.
Ensuite, il y a la notion de facteurs de charge qui est une notion très importante. L’ensemble du parc éolien français a un facteur de charge de 21%. A titre de comparaison, c’est un peu comme si on avait une usine construite pour fabriquer 100 bagnoles à l’année, et qu’à la fin, seules 21 voitures sont produites.
C’est tout le problème de l’éolien qui est intermittent. Cela produit de l’électricité quand il y a assez de vent. Mais quand il y n’en a pas, ça ne produit pas. Et on est obligé d’arrêter les éoliennes quand il y a trop de vent.
Donc, on est obligé de compenser cette intermittence par des backups, au gaz, au pétrole et au charbon parce que les centrales nucléaires ne sont pas modulables comme les centrales fossiles.
Cette crise énergétique est-elle une conséquence de la guerre en Ukraine ?
La guerre en Ukraine permet de maquiller la réelle cause profonde de cette crise. La première raison de la crise, c’est d’abord la relance post-covid qui a lieu donc en septembre 2021. Et on a eu simultanément une panne électrique liée à la faible production des éoliennes.
L’Institut Copernicus de la Commission européenne a dévoilé dans un rapport, une baisse historique des vents depuis 43 ans. Et quand on a une baisse de régime des vents de 10%, ce qui a été le cas dans certains pays européens, nous avons une baisse de production d’électricité éolienne de 27%.
D’ailleurs, le GIEC, dans son Atlas, a précisé que les modifications climatiques allaient conduire à une baisse des régimes des vents. Cette baisse a eu pour conséquence que l’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Irlande ou le Danemark devaient compenser leur intermittence avec énormément de gaz.
C’est ce qui a contribué à l’explosion du prix du gaz.
Et un article de Newsweek, dès octobre 2021, précise que les pannes d’éoliennes à l’origine de la crise énergétique en Europe sont un avertissement pour les États-Unis. C’est quand même extraordinaire.
S’ensuit le mécanisme du marché européen de l’électricité qui fonctionne sur la base du Merit Order, c’est-à-dire que le prix de l’électricité dépend de l’unité de production la plus chère. Donc, comme le gaz a vu son prix exploser, eh bien, tous les pays européens sont du coup alignés sur le prix du gaz.
En plus, on a eu un autre souci en France alors que l’on aurait pu faire fortune avec nos réacteurs nucléaires puisqu’on avait 56 réacteurs dont quelques-uns étaient à l’arrêt. Eh bien, l’Autorité de sûreté nucléaire, sur le principe de précaution poussé à l’outrance, a fait arrêter 32 réacteurs sur 56.
Ce qui fait que la France, qui était l’un des pays les plus exportateurs d’électricité jusqu’à l’année dernière, est devenu importateur net d’électricité, principalement venant d’Allemagne.
Enfin, cette crise énergétique a été aggravée par le sabotage de Nord Stream 1 et Nord Stream 2.
Et avec le Merit Order, nous sommes en train de payer la dépendance au gaz de l’Allemagne qui détruit notre compétitivité industrielle.
C’est extrêmement grave et je parle d’une guerre énergétique avec l’Allemagne.
Le Président de la République a annoncé pour 2050, l’objectif de doubler la production d’éoliennes terrestre et de déployer 50 parcs éoliens en mer.
Le premier parc éolien en mer en France vient d’être inauguré avec 80 éoliennes et doit produire l’équivalent de 20% de la consommation annuelle d’électricité en Loire-Atlantique, soit l’équivalent de la consommation annuelle de 700 000 personnes. C’est quand même pas mal !
Finalement, le vent, le soleil, l’eau sont des énergies renouvelables, inépuisables. En quoi l’éolien pose-t-il un problème ?
Vous soulignez une donnée qui relève du greenwashing. Si on parle du mix énergétique, c’est-à-dire le besoin en énergie dans notre pays, on voit qu’il comprend 40% de nucléaires, presque 45 % de fossiles et 12,5% d’énergies renouvelables. Nos barrages représentent 2,4% et l’éolien 1,6%.
Si on prend les ambitions du Président de la République – qui a les mêmes chiffres que moi sur le mix énergétique – de multiplier par deux le nombre d’éoliennes en France, en réalité, on obtiendrait, bon mal an, 3%, sachant qu’en plus, la productivité des premières éoliennes diminuent en fonction de l’âge.
Une étude anglaise a établi que le facteur de charge d’une éolienne était de 21% la première année, 15% au bout de 10 ans et 10% au bout de 15 ans. En France, l’année dernière, on a augmenté de 7% le nombre d’éoliennes et on a eu une baisse de 7 % de la productivité globale en intégrant les nouvelles. Donc on voit qu’il y a un vrai problème de réalité.
Après, il y a un problème écologique lié à l’éolienne.
On se retrouve avec une armature en ferraille de 50 tonnes pour le socle en béton. Les nacelles d’éoliennes, l’endroit où on transforme le vent en électricité, comprennent du néodyme, un métal rare. Il faut charrier des tonnes de terre que l’on va passer à 10 bains d’acide oxalique et sulfurique. C’est tellement polluant que les pays occidentaux ont arrêté de le faire.
Enfin, les fibres de carbone des pales sont dures, solides et légères, mais elles le sont tellement qu’elles ne sont pas recyclables. En France, nous avons 8 500 éoliennes, ça fait 25 500 pales. Qu’est-ce qu’on en fait ? Il y a aujourd’hui 400 000 éoliennes dans le monde, ça fait 1 200 000 millions pales d’éolienne que l’on va devoir balancer.
De plus, les pales d’éolienne nécessite du balsa, un bois extrait d’Amazonie. Et comme il n’y a pas assez de balsa, eh bien, on a une déforestation amazonienne.
Vous voyez, lorsque l’on parle d’éolienne, on a vraiment un monstre écologique qui est devant nous et qui est apparent.
Ce sont des preuves irréfutables.
On veut nous vendre un modèle allemand qui est un échec retentissant. On nous culpabilise en nous disant que l’on doit payer 500 millions d’euros. On n’a pas fait de renouvelables parce que nous n’avons pas d’entreprise de renouvelable.
Aujourd’hui, ce sont les Allemands et les Danois qui disposent des entreprises de fabrication d’éoliennes…
Il y a aussi une chose qui est très importante qu’on ne nous dit pas, c’est que si on a 1,6% d’éolien, c’est aussi qu’il y a une priorité dans le réseau : quand on n’a pas besoin d’électricité, on baisse la production des centrales nucléaires pour laisser passer l’énergie éolienne. C’est-à-dire qu’en réalité, c’est une électricité surabondante parfois, pas tout le temps, moins maintenant puisque évidemment, on a des centrales nucléaires à l’arrêt...
Quel serait alors le mix énergétique idéal ?
... Je suis pour l’abandon total des énergies renouvelables intermittentes, c’est-à-dire solaire et éolien, éventuellement dans l’auto-consommation pour le solaire mais pour l’éolien, ça ne sert à rien.
Si demain, on a un pic de consommation en janvier-février-mars et que les éoliennes ne tournent pas. Que faîtes-vous ?
Au Texas, il y a eu d’énormes blackouts parce qu’ils ont fortement investi dans un éolien qui ne tournait pas au moment des grands froids.
On a voulu mettre dans notre mix électrique du nucléaire pilotable avec de l’énergie intermittente aléatoire. Donc, pour moi, il faut arrêter parce que je pense que c’est un caillou dans la chaussure de notre mix.
Il faut développer le nucléaire et réouvrir Fessenheim. Et puis, il faut essayer du gaz au moment de ces pics de consommation, du gaz que l’on peut hydrogéner avec de l’hydrogène que l’on produit grâce aux centrales nucléaires lors des basses consommation. Donc on fait de l’hydrogène vert.
La Commission européenne vient de décider que l’on pouvait faire de l’hydrogène avec du charbon, du pétrole et du gaz, mais dans ce cas-là, c’est un hydrogène sale. Cela n’a aucun sens. L’hydrogène ne peut être de qualité que s’il est réalisé par une électricité décarbonée et la meilleure et la plus puissante, c’est le nucléaire.
Pour aller plus loin : ÉTUDE CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL Quelle place pour le nucléaire dans le mix énergétique français ? Expérimentation de la méthode de clarification des controverses. Juin 2022
La BIO
Fabien BOUGLÉ, fondateur de Saint Eloy Art Consulting, est consultant en gestion de patrimoines artistiques. Juriste de formation (maîtrise de droit privé), il est titulaire d’un DESS Gestion de Patrimoine et d’une licence d’histoire de l’art. Il a notamment dirigé le département oeuvres d’art d’un établissement financier français, la compagnie d’assurance spécialisée dans les objets d’art, AXA Art.
Propos recueillis par Brice Girod, Directeurs des Programmes d’Agora Managers Groupe.