Immobilier : Comment les chantiers deviennent plus écoresponsables
#RE2020 #ACV. De la nécessaire réduction de l’impact carbone du secteur du bâtiment.
Les directeurs immobiliers jouent un rôle crucial dans la réduction de l’impact carbone du secteur du bâtiment en raison de leur position stratégique et de leur engagement dans l’adoption de technologies et de pratiques de construction durables.
Pour en parler, Eric BALECH, Directeur Commercial de SPEBI, spécialiste du ravalement, de l’isolation thermique, du bardage ou encore du désamiantage, qui nous détaille, étude à l’appui, les meilleures pratiques en matière d’impact carbone d’un chantier. Évaluation de l’empreinte carbone – Choix des matériaux – Gestion et tri des déchets…
Lionel Cottin : Comment évalue-t-on aujourd’hui l’impact carbone d’un chantier ?
Eric Balech : Il existe aujourd’hui un logiciel qui permet d’identifier exactement la quantité de CO2 dépensée sur un chantier. L’estimation, c’est environ 200 000 kilos de CO2 pour un chantier d’environ 1 million d’euros. Donc, c’est assez important.
Et il y a plusieurs paramètres : la gestion des déchets, les déplacements, le type de produits qui sont choisis.
Lionel Cottin : C’est surtout le type de produits choisis qui compte !
Eric Balech : Ça compte énormément et c’est le sens de l’histoire. Aujourd’hui, le législateur est extrêmement sensible à ça. A tel point que pour la première fois, nous avons des aides et nos clients ont des aides sur des chantiers écoresponsables parce que justement, ils ont fait l’effort de cette démarche.
Lionel Cottin : 90 % de l’impact carbone d’un chantier, ce sont les matériaux, les produits, les équipements, avec un petit peu de déplacement des salariés mais également, la gestion du tri des déchets.
Eric Balech : Sur un chantier sur lequel le client a décidé qu’il soit écoresponsable, il y a du tri sélectif à la source, c’est-à-dire qu’on installe dans des big bags, des tris sélectifs qui partent en recyclage. Cela veut dire que c’est une gestion particulière du tri, mais aussi de l’envoi des déchets aux déchetteries. Donc, c’est une gestion de tous les jours ?
Par exemple, fini la peinture dans le caniveau !
Lionel Cottin : Ah oui, ça se faisait ?
Eric Balech : Ça se fait encore, il faut en avoir conscience. Maintenant, c’est contrôlé et ce n’est que du bon sens en réalité.
Lionel Cottin : Du coup, vous sécurisez aussi la zone ?
Eric Balech : Oui, on est obligé de sécuriser aussi pour que les machines à laver ne partent pas avec les peintures par exemple. Donc on met à contribution les fabricants également.
Lionel Cottin : Et vous avez maintenant des filières de revalorisation où les différents déchets – bois, gravats, plastique, laine de roche, peinture – vont chacun dans une filière bien particulière. Cela fonctionne-t-il ?
Eric Balech : C’est extrêmement bien organisé. C’est une démarche vraiment particulière. On dédie quelqu’un qui contrôle tout cela le matin et le soir. Et puis, il y a aussi un sujet sur les déchets de l’amiante qui est encore une gestion à part.
Lionel Cottin : Outre cette gestion de tri des déchets, un chantier écoresponsable, c’est aussi le recours à des matériaux biosourcés, par exemple, avec du bois ou de liège.
Eric Balech : Jusqu’à présent, on utilisait le polystyrène et la laine de roche, qui sont les seuls matériaux à avoir des techniques pour de l’isolation. Mais depuis quelques années, et dans cet esprit de démarche environnementale, on a mis en œuvre des chantiers avec du liège et du bois. Je ne parle que de ces matériaux parce que ce sont les seuls aujourd’hui qui ont des avis techniques. Donc ça ne sert à rien de parler du reste comme du chanvre.
Et le bois et le liège ont d’autres vertus que d’être biosourcés. Quand on parle de produits biosourcés, on parle de plus en plus de déphasage (Le déphasage thermique d’un isolant représente le temps qu’il va faire barrage à la chaleur venant de l’extérieur et protéger l’intérieur). Jusqu’à présent, on parlait de l’isolation pour la protection du froid. Mais ce qui nous attend dans les 20, 30 années qui viennent, c’est le problème du chaud.
Or on s’aperçoit que les seuls isolants qui ont vraiment une performance de résistance au chaud, ce sont un, le bois , deux, le liège. Et de loin ! Sur 20 cm d’isolant, on peut garder un bâtiment au frais pendant 15 h. Donc c’est extrêmement important pour une économie de climatisation. Ça va être ça le sujet.
Alors que les isolants traditionnels sont sur des protections du chaud de 4 à 5 h. Ça change tout !
Donc il faut pousser cette voie car au-delà de l’aspect environnemental de l’impact CO2 sur l’instant, il y a aussi l’investissement dans le temps avec la protection du chaud.
Lionel Cottin : Alors pour limiter aussi les coûts et les déchets, vous recourez aussi à de nouvelles méthodes comme par exemple, le calepinage ?
Eric Balech : Pour éviter d’avoir à gérer trop de déchets, l’idéal, c’est de ne pas en faire.
Donc on demande à un dessinateur de faire une modélisation de ce que sera le chantier découpé avec les panneaux, que ce soit pour les isolants, le bardage, etc. Donc après, on sait exactement ce dont on a besoin en panneaux entier et en panneaux que l’on va découper sur place. Par exemple, sur un chantier d’un bâtiment que l’on voit à l’écran, il y a 316 panneaux entiers et 179 qui sont découpés. Donc en gros, on va commander 495 panneaux et on n’aura pas besoin de plus.
Lionel Cottin : Et sans cette technique-là, vous étiez amenés à commander beaucoup plus ?
Eric Balech : Oui, parce que d’abord, les fournisseurs ne livrent pas à la petite semaine. On commandait jusqu’à présent une seule fois et puis le reste partait sur d’autres chantiers, ou disparaissait ou allait en déchetterie.
Ou bien les fournisseurs d’isolants les recyclaient, ce qui n’a n’a pas de sens. Tout cela représente du volume. Il vaut donc mieux faire, au plus juste.
Lionel Cottin : Ces nouveaux chantiers écoresponsables font aussi désormais beaucoup plus de place au vivant, à la faune et la flore. Est-ce que vous avez des exemples ?
Eric Balech : Alors, dans le cadre d’un chantier écoresponsable, il y a deux choses : on limite l’impact négatif et on amène un impact positif. Alors on dit écoresponsable pour ne pas dire chantier zéro carbone. C’est-à-dire qu’on intègre du vivant. On fait venir un paysagiste qui, dans le cadre d’une harmonie avec une sélection d’arbres bien précise, amène du paillage, des arbres non allergisants et du vivant avec des ruches et des refuges pour insectes et oiseaux.
Et en réalité, on alloue un budget d’environ 2 % à la réintégration du vivant, avec une vraie recherche, une vraie harmonie avec l’environnement.
Et c’est d’ailleurs là-dessus que l’on a des aides.