Au cours des trente dernières années, il a traversé la plupart des grandes crises en tant que chef d’entreprise dans divers grands groupes. C’est aussi un musicien de formation classique passionné de jazz.
Xavier Durand, aujourd’hui Directeur général de la Coface, a ainsi dû gérer les contrecoups de la crise immobilière en 1991, la crise asiatique de 1998, l’explosion de la bulle Internet en 2000, les attentats du 11 septembre 2001, la crise financière de 2007-2008, la catastrophe de Fukushima, la crise sanitaire du covid-19…
C’est lors du Covid 19, profitant d’un confinement forcé, qu’il décide de résumer dans un petit essai « Osez le risque, le management dans un monde incertain » *, quelques principes d’action pour les dirigeants. Un livre dans lequel il plaide pour un leadership éclairé capable d’improvisation maîtrisée à l’image de la figure du jazzman. Et d’aider à l’émergence de leaders éclairés, conscients de leur vulnérabilité et de leurs limites, aptes à composer leur partition en temps réel.
Avec la guerre en Ukraine et les tensions sino américaines, Xavier Durand revient avec nous sur la question de la prise de risque et du management dans ce monde en crise où les entreprises qui créent de la valeur sont celles qui parviennent à maîtriser les risques tout en sortant de leur domaine de confort.
Il conseille ainsi, à contrario d’une organisation très structurée, très matricielle, très contrôlante, un management décentralisé dans une entreprise qui doit, dans un processus de décision, développer une culture où la prise de risque est valorisée et la possibilité de l’échec intégrée. Une organisation souple et agile…
Xavier Durand : Nous sommes confronté à une succession de crises qui semble ne jamais s’arrêter et je pense que les thèmes abordés dans mon livre restent complètement vrais. Je crois que le seul moment où vous n’avez pas de risque, c’est quand vous êtes mort.
Tout ce qui crée de la valeur est risqué. Toutes les grandes réalisations humaines sont des entreprises, des découvertes, des connaissances que l’on a acquises en prenant des risques. L’aviation était dangereuse à ses débuts, la construction des barrages, on s’est trompé. Le nucléaire, il y a eu des accidents. Tout ce qui crée de la valeur finalement sont des entreprises qui sont risquées et dont on apprend à maîtriser les risques.
Alors on a développé tout un tas de techniques, de technologie, de savoirs pour mieux maîtriser les risques. C’est une recherche permanente dans le monde des affaires, mais aussi dans la technologie, dans l’apprentissage… et cela porte des noms : Process management, Risk management, Planification stratégique, Lean Six Sigma. Au final, c’est de dire que ces techniques sont très bonnes, qu’il faut les adopter et il faut investir. Mais elle ne permettent de bien contrôler que les risques que l’on connaît déjà.
Il faut donc créer une culture d’entreprise ou une culture de groupe si vous voulez, qui soit une culture d’apprentissage, qui soit une culture de résilience, une culture de réactivité : j’appelle cela une culture d’improvisation maîtrisée qui permet d’inventer la réponse à ce phénomène que l’on ne connaît pas et que l’on pourra amoindrir ou que l’on pourra gérer au mieux en mettant autour de la table, un ensemble de compétences uniques, très fortes et les faire travailler ensemble en temps réel à une solution.
Donc, c’est une culture d’improvisation maîtrisée par rapport à une culture de contrôle et de décision centralisée qui se révélera à ce moment-là complètement inadaptée à ce nouveau phénomène inconnu, soudain, potentiellement plein de risques, mais aussi peut-être, parfois plein d’opportunités auquel on va être confronté…
Osez le risque, c’est oser prendre le risque de ne pas être le seul décideur, de déléguer un certain nombre d’actions et d’autonomie dans la prise de décision, d’accepter que d’autres vont se tromper, mais que, au total, la somme de leurs erreurs sera inférieure à l’erreur que j’aurais pu faire moi-même si je devais tout décider. Ce qui est humainement impossible…
A propos du livre : « Osez le risque, le management dans un monde incertain » aux éditions Hermann.
Comment diriger et gouverner dans notre univers de risque ? De crises sanitaires en bulles financières à répétition, de tensions géopolitiques en catastrophes climatiques, de bouleversements sociétaux en ruptures technologiques, les décideurs sont aujourd’hui confrontés à des chocs permanents qui rendent l’environnement moins prévisible qu’autrefois.
Pour angoissante qu’elle soit, cette situation est également une chance : le risque n’est pas seulement une menace ; il est aussi – et surtout – une opportunité de progrès et d’apprentissage par l’essai, dont l’échec fait partie, à condition bien sûr de développer une culture de responsabilisation et une gouvernance capables d’en tirer parti.
S’inspirant de la figure du jazzman, Xavier Durand invite les décideurs à abandonner le costume d’un chef d’orchestre persuadé de connaître tous les mouvements à l’avance, et plaide pour l’émergence de leaders éclairés, conscients de leur vulnérabilité et de leurs limites, aptes à composer leur partition en temps réel, en écho aux réflexions de leurs collaborateurs et en résonance avec le tempo si particulier de notre époque. En découle une philosophie d’action permettant d’envisager autrement les problématiques de gestion des crises.
LA BIO de Xavier Durand, X-Ponts, depuis 2015, directeur général de Coface, entreprise leader de l’assurance-crédit.
Depuis 2016, je suis Global CEO de Coface, la référence mondiale de l’assurance-crédit et de la gestion des risques. Avec plus de 4 500 collaborateurs dans 70 pays, Coface aide ses clients à surveiller, prévenir et gérer efficacement des expositions totales au risque de crédit de plus de 600 milliards d’euros dans 200 pays.
Ma carrière a commencé en 1987 au sein du cabinet de conseil en stratégie The Mac Group (aujourd’hui Gemini Consulting). Après un passage dans l’industrie de l’assurance chez Covea à la tête de projets stratégiques et de fusions et acquisitions, j’ai rejoint l’ancien Groupe Sovac en tant que PDG de leur banque hypothécaire, avant qu’elle ne soit acquise par GE en 1995. J’ai ensuite mené une carrière internationale de 19 ans chez GE Capital, dirigeant au fil des ans, des entreprises de plus en plus grandes et complexes dans 30 pays d’Amérique, d’Europe et d’Asie, à travers des programmes de croissance/acquisition et de restructuration/transformation. Cela a culminé en tant que PDG de GE Capital Asia Pacific, un bilan de 100 milliards de dollars couvrant un large éventail de services financiers, des prêts et cartes à la consommation au crédit-bail, au financement structuré, au capital-investissement et à la banque de détail.
J’ai été président ou membre du conseil d’administration de banques réglementées ou d’entités de services financiers dans plus de 14 pays, notamment en siégeant au conseil d’administration ou en tant que PDG de 4 grandes sociétés cotées.
Au-delà du travail, je suis aussi passionné de sport (squash, ski, windsurf). J’aime la musique que j’ai apprise dès mon plus jeune âge et je joue encore du jazz dans des groupes et des clubs à ce jour.
Dans un monde en constante évolution, je me concentre sur la conduite d’équipes à travers des transformations profondes, alliant une capacité unique à élaborer des stratégies gagnantes avec la capacité d’exécuter efficacement. Je me concentre sur la conduite des équipes pour qu’elles adoptent la vérité et une collaboration efficace en tant que moteurs clés de la performance.
Pour moi, travailler en équipe, c’est comme jouer dans un groupe de jazz. Il faut s’entendre sur des principes de base, définir une vision, une ambition, s’entourer de grands joueurs qui partagent la passion de ce qu’ils font, puis créer un climat de confiance et de collaboration pour que l’inattendu se transforme d’une menace en une belle possibilité de créer quelque chose d’unique.
Xavier Durand est ou a été membre du conseil d’administration de plusieurs grands groupes internationaux dont : ALD Automotive, Axa en France, WiZink Bank en Espagne, Garanti Bank en Turquie, Krungsri Group en Thaïlande ou Hyundai Capital en Corée