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TDAC : Laurent Perbos, La beauté et le geste

Laurent Perbos, artiste plasticien de renom, se distingue par ses sculptures et installations qui redéfinissent les frontières entre l’art, le sport et la culture populaire.

Ses œuvres, monumentales ou poétiques, transforment des objets du quotidien en explorations artistiques inédites. Parmi ses créations emblématiques, on trouve des terrains de sport « hors-jeu », des oiseaux naturalisés empreints de poésie, le plus long ballon du monde, des tables de ping-pong suspendues, et des compositions ludiques réalisées à partir de jouets de plage gonflables. Ces objets usuels, issus de la consommation de masse, deviennent sous ses mains la matière première d’un travail centré sur la forme et le sens.

Artiste aux multiples facettes, formé à l’École d’art de Bordeaux et installé aujourd’hui à Marseille, Laurent Perbos puise son inspiration dans les références culturelles populaires. À travers ses créations, il interroge avec subtilité l’objet usuel, commun, banal, issu de la consommation de masse comme matière dans un travail de forme.

De Milos à Paris

C’est à l’occasion de son installation « La beauté et le geste », (des Venus aux couleurs acidulées exposées devant l’Assemblée nationale dans le cadre des JO 2024), que nous avons rencontré Laurent Perbos afin de mieux connaitre l’univers singulier de cet artiste, où la forme se fait mouvement, la finalité plastique ou ludique. 

photo Anais Pons Prades laurent perbos
La Beauté et le Geste de Laurent Perbos / Assemblée nationale – Mécénat du groupe Uhoda

« En 2023, l’Assemblée nationale m’a contacté pour me proposer un projet dans le cadre des J.O. 2024. J’avais précédemment exposé une œuvre dans le cadre des Nuits blanches en 2021, qui était un terrain de tennis sur les marches de la BNF à Paris. C’était un terrain de tennis aux dimensions réglementaires, soit 23 mètres par 11, un peu plus de 200 mètres carrés, que j’avais déployé sur une partie des marches.

Cette œuvre avait un impact visuel fort, et je pense qu’ils avaient en tête ce type d’installation, ainsi que d’autres œuvres que j’ai réalisées autour du sport. Il faut dire que deux ans auparavant, en 2019, j’avais été invité à une exposition en Allemagne autour du sport, où j’avais produit une Vénus de Milo à laquelle j’avais ajouté des bras. Cette version s’illustrait dans une position sportive, en plein geste d’un match de tennis.

Cette sculpture avait un symbolisme particulier : la Vénus de Milo, une icône de l’art antique, est souvent vue comme une figure d’incomplétude à cause de l’absence de ses bras. En les rajoutant dans un geste sportif, je souhaitais explorer la manière dont le handicap peut être interprété autrement, non pas comme un manque, mais comme un espace de créativité, de réinvention et de force.

Cette réflexion a été enrichie par les valeurs des Jeux paralympiques. J’ai voulu que cette Vénus réimaginée rende hommage à la résilience et à la diversité des corps. Elle est devenue une métaphore de l’inclusion et de la performance humaine, indépendamment des limitations physiques.

Pour renforcer ce message, j’ai choisi des matériaux écoresponsables et un spectre chromatique large, représentant toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Cela symbolise à la fois la diversité humaine, qu’elle soit culturelle, physique ou de genre. Le but était de faire de cette Vénus un pont entre le patrimoine classique de Paris, la ville musée, et les valeurs modernes des Jeux de 2024, où inclusion, égalité et dépassement de soi sont mises à l’honneur.

Je ne fais pas un art pour qu’il soit vendu. Je fais d’abord un art parce que je pense qu’il est juste et ensuite on va voir s’il trouve l’adhésion du public.

Laurent Perbos / Instagram
Laurent Perbos / Instagram

Du ready-made en question

Fidèle à son intention de toucher un large public, Laurent Perbos utilise des objets universels comme matière première, puis les transforme, les déforme et invite les spectateurs à interagir : « Pour mes tables de ping-pong par exemple, les visiteurs cherchent immédiatement les raquettes et les balles. L’objet familier devient alors passerelle vers l’art.

Mon but n’est pas de donner des réponses, mais de poser des questions. Je pars toujours du principe que je vais essayer d’abord d’amener le spectateur par l’objet qu’il connaît et ensuite l’œuvre va véhiculer sa propre histoire qui va être communiquée aux spectateurs. 

Des collaborations prestigieuses
Outre les expositions muséales, Laurent Perbos multiplie les collaborations avec des marques prestigieuses comme Hermès, Lacoste ou Volvic. Ces partenariats lui permettent de concilier art et visibilité tout en élargissant son public. Il a récemment conçu un terrain de rugby éphémère sur les volcans d’Auvergne pour une campagne publicitaire mettant en scène notre champion olympique de rugby, Antoine Dupont.

« Ces projets sont de véritables opportunités », confie-t-il. « Ils dynamisent mon processus créatif tout en apportant des moyens de production. Je revendique un art accessible, ancré dans la culture populaire, et ces collaborations en sont une extension naturelle… »

Influence et inspirations
« Je reste très respectueux du travail de Jeff Koons parce qu’il y a ce petit côté très ludique, très populaire. On a l’impression que l’on comprend tout alors que ses recherches et sa démarche artistique sont très pointues. Et je suis très admiratif du travail de Mathieu Lehanneur (Torche et vasque olympiques).

Une vision poétique et mythologique
Avec le temps, l’univers de Laurent Perbos s’est enrichi d’un volet plus onirique. Ses œuvres récentes, telles que des bustes antiques recouverts du revêtement d’un ballon de basket ou des oiseaux taxidermés ornés de masques et de coiffes, explorent la rencontre entre poésie, mythologie et symboles contemporains. « Plus qu’un simple détournement, je cherche à créer des mondes nouveaux », affirme-t-il. L’artiste crée des mondes qui n’existent pas, il crée de la recherche, il expérimente des choses. Donc j’explore des nouveaux territoires en mélangeant des couleurs, des formes entre elles pour voir ce qui se passe et plus notre univers est doté de formes, de technologies, plus on va aller chercher au travers de ces technologies, de ces matériaux.

L’art, moteur de réflexion sociale
Engagé pour une meilleure reconnaissance des artistes, Laurent Perbos plaide pour un soutien accru des institutions et du mécénat privé. « Produire de l’art est coûteux et incertain. Les artistes doivent être mieux accompagnés, que ce soit via des commandes publiques ou des initiatives privées. »

Entre expérimentations plastiques et collaborations audacieuses, Laurent Perbos continue ainsi d’explorer de nouveaux territoires pour rapprocher l’art du quotidien et poser un regard poétique sur notre époque.

Patrimoine national
L’artiste évoque désormais deux grands axes pour ses projets à venir. Tout d’abord, il souhaite faire entrer ses Vénus dans le patrimoine national, témoignant ainsi de son ambition de voir ses œuvres reconnues comme des éléments majeurs de la culture française. 

Par ailleurs, conscient de l’écho mondial suscité par la médiatisation de ses Vénus exposées sur les marches de l’Assemblée nationale, il envisage de développer davantage sa présence à l’international, avec l’objectif de renforcer son rayonnement artistique global et, par ricochet, de mieux ancrer son travail en France.

Interview réalisée par Fabienne Elissalde, conseillère éditoriale de TDAC.

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